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Alors que les années de maternelles s’étaient super bien passées, tant d’un point de vue relationnelle que d’un point de vue scolaire. Directrice et maîtresses avaient été extraordinaires avec nous durant trois ans. La rentrée au CP en 2001 a dénoté avec la grande section maternelle.

— Non ! Félix ne pourra pas venir à la piscine, me répondait la maîtresse droit dans les yeux.

—  Même si je suis présente sur le bord ?

—  Non, les parents ne sont pas autorisés à être sur le bord, on n’est plus en maternelle.

— Mais si je ne suis pas présente, Félix ne pourra pas venir aux séances piscine !

—  Et bien tant pis, il ne fera pas piscine.

Fin de la discussion !

Je ne m’attendais pas à cette conversation, ce n’était rien par rapport à ce qui nous attendait les années suivantes, mais ça donnait le ton de ce qui nous serait réservé à la grande école.

Bien sûr, je n’avais pas dit mon dernier mot. Hors de question que la maitresse décide, comme ça devant le portail de l’école, l’exclusion de mon fils aux sorties piscine. Pas une question sur la maladie de mon fils, pas d’intérêt sur ce qui se faisait en maternelle ni sur le niveau de natation de mon tintin. C’était un peu raide quand même pour une maman qui se démène pour tout débroussailler avant. Naïvement, j’avais projeté la fluidité d’organisation vécue en maternelle sur celle du primaire. Petit choc de rentrée scolaire.

Le milieu aquatique présente un gros risque de noyade

Cela faisait deux ans que j’accompagnais toutes les sorties à la piscine de Saint Symphorien d’Ozon et tout se passait très bien. Félix avait été au cours des bébés nageurs à Saint Priest (69), il savait nager comme un poisson dans l’eau ! Si l’épilepsie venait brouiller les règles du jeu, le milieu aquatique peut présenter un gros risque de noyade pour une personne épileptique*, je n’allais pas abandonner comme ça.

Il me semble avoir échangé avec le directeur de l’école primaire qui ne s’est pas mouillé en allant dans le sens de la maitresse du CP. Alors je suis allée voir le maitre-nageur de la piscine. Pierre nous connaissait très bien puisque nous venions aussi nous baigner pendant les vacances. Il adorait ma fille Alix, il l’avait repérée dans le bassin, il aurait voulu qu’elle s’inscrive à la rentrée aux poissons volants. Elle n’avait que trois ans et traversait déjà le bassin aussi vite que son grand frère.

—  Dis-moi Pierre, il faut que je te parle j’ai un problème avec la maitresse de CP.

Pierre levait les yeux vers moi tout ouïe.

—  Voilà, Félix a été diagnostiqué épileptique et donc son médecin neurologue est d’accord pour qu’il se baigne à condition que je sois présente, cette année la maitresse de CP a refusé que je vienne et elle interdit Félix de venir aux sorties piscine

—  Quoi ? mais non on ne peut pas faire ça ! Mon meilleur ami est épileptique, je connais bien cette maladie, tu viendras sur le bord il n’y a pas de souci, il n’est pas question que Félix soit privé d’activité piscine, tu pourras dire à la maitresse que tu as l’autorisation du maitre-nageur.

Il fallait comprendre la position de cette maîtresse, Madame T. qui respectait une règle stricte mise en place suite aux comportements déplacés de certains parents accompagnateurs. Afin d’éviter les interventions intempestives de parents pendant les cours de natation, ceux-ci étaient désormais assignés dans les vestiaires. Interdits d’accès au bord du bassin, ils n’avaient plus le droit de dépasser le pédiluve.

L’histoire voudra que la maitresse de CP n’a pas pu s’opposer à ma présence sur le bord du bassin. Félix a pu faire toutes les sorties piscine avec sa classe. Au fil des mois, Madame T. a appris à mieux connaître Félix. Elle adorait son humour décalé. Nous avons passé une très bonne année scolaire. Nous avons gardé contact plusieurs années après en s’envoyant régulièrement des cartes postales.

 * L’activité sportive dans l’eau n’est pas contre indiquée. Mais les noyades sont une cause majeure de mortalité chez les personnes épileptiques. Pour toute activité en piscine ou milieu naturel, il est conseillé d’en parler avec son médecin pour établir un cadre bien précis de surveillance individualisée, de l’observance du traitement…