Patrice était un de mes collègues, à l’époque où je travaillais dans les TP, qui était un passionné du saut à l’élastique, le Benji. Il ne parlait que de ça, le caoutchouc, l’extension, la vitesse de chute… Même sa famille pratiquait avec lui ce sport à sensation et était bien sûr embarquée dans son projet de record du monde. C’était en 2008.
Comme nous avions bien sympathisé et que Patrice avait le sens de la solidarité, je lui avais proposé de faire un partenariat avec Epilepsie France, association dans laquelle je me suis beaucoup investie pendant un temps. L’objectif était de parler de la maladie lors de son événement exceptionnel de record du monde de saut à l’élastique depuis un hélicoptère, à plus de 1 700 mètres de hauteur. Il avait dit oui sans hésiter.
La boite le soutenait comme d’habitude puisqu’il avait animé plusieurs séminaires avec du saut à l’élastique depuis une grue. Pour sa tentative de record, il avait même eu accès à la cour de l’entreprise pour fabriquer son élastique durant un week-end. Parmi les collègues, certains se moquaient du projet par derrière, les critiques allaient bon train entre eux, mais je ne l’ai su qu’après, c’est mon côté naïf.
Le jour J arriva, nous étions tous très excités à l’idée de vivre une expérience exceptionnelle. Nous en avions parlé autour de nous, au boulot, à la presse… une convention de partenariat liait l’association EF au projet sensationnel de Patrice.
Tout son staff était sur le pied de guerre, nous les avions rejoints tôt vers Annecy, sur un aérodrome privé. Nos parents devaient nous retrouver dans la matinée, des collègues, la présidente d’EF était là aussi… il y avait une ambiance tellement intense qu’on aurait dit une vraie grande famille.
Un représentant officiel du Guinness des records du monde avait suivi tous les préparatifs, vérifié le matériel juste avant le saut à valider. L’élastique avait été enroulé délicatement dans l’hélicoptère, Patrice se préparait mentalement, le pilote de l’hélico attendait. Nous étions tous en suspension, avec nos appareils photos pour immortaliser le moment.
Sensible à la cause de la maladie, du handicap
Arrivé, à bonne hauteur, à près de 1 700 mètres, Patrice avait sauté de l’hélico pour un saut de 1 500 mètres, pendu par les pieds, nos yeux étaient écarquillés au max… la chute et soudain l’arrêt complet avant même du déploiement total de l’élastique ! En bas, nous n’avions pas eu l’info tout de suite, l’élastique s’était emmêlé et avait stoppé net la tentative de record du monde. Des semaines de préparation et tout s’arrêtait sous nos yeux en quelques secondes. Plus de record, plus de communication, on enterre le partenariat.
J’ai appris plus tard que Patrice avait déjà été la cible de critiques dans la presse dans une autre région à cause de sa pratique du saut à l’élastique. Sûr de lui, le personnage était sympathique et très attachant, sa famille aussi, nous avions passé de très bons moments tous ensemble. Il était très sensible à la cause de la maladie, du handicap et cela m’avait beaucoup touchée.
Il n’est pas resté dans l’entreprise, parti avec un autre projet professionnel mais en gardant toujours son rêve de record du monde de saut à l’élastique. Je n’ai plus jamais eu de contact avec lui.